Sarah


Sarah est une jeune fille de 13 ans à peine. Mais en fait, dans sa tête, elle est encore plus petite. Comme elle a l'habitude de le dire, elle a eu un problème avec son chromosome X, et elle souffre d'un retard psychomoteur qui lui fait accuser un retard dans ses acquisitions.

Sarah avait l'habitude d'aller passer une partie de ces week-ends chez son parrain. Celui-ci a un fils.

Un soir, alors que Sarah était censée dormir chez son parrain, ce dernier a appelé la mère de Sarah  pour qu'elle vienne la chercher, Sarah voulant absolument rentrer chez elle.

Une fois rentrée à la maison, Sarah  posa la question à sa maman si on avait le droit de toucher son corps. Interloquée par cette question, la mère fait parler Sarah et finit par comprendre, car Sarah le lui explique, que cette dernière était avec le fils de son parrain en train de jouer à la console de jeux lorsque ce dernier lui a proposé de changer de jeu et de jouer au jeu du goût.

Évidemment, Sarah ne savait pas de quoi il s'agissait, mais elle s'est volontiers prêtée à ce jeu avec ce garçon en qui elle avait toute confiance. Il s'agissait pour elle de fermer les yeux et d'essayer de déterminer ce que ce garçon pouvait éventuellement lui faire goûter.

Comme elle le dit elle-même, elle a eu la sensation d'avoir dans la bouche quelque chose qui avait mauvais goût, et qui lui a laissé un liquide comme du shampooing blanc dans la bouche.

Lorsqu'elle a ouvert les yeux, elle a trouvé le fils de son parrain le caleçon sur les genoux et le pantalon baissé. Celui-ci n'a eu de cesse que de lui expliquer qu'elle avait juste sucé une bouteille. Il n'y a évidemment pas cru.

Apprend avoir parlé à ses éducatrices et à sa mère, ces dernières ont déposé plainte et  l'agresseur présumé de Sarah sera jugé dans quelques jours par le tribunal correctionnel de Carpentras.

Cette affaire pose une fois de plus le problème du difficile recueil de la parole d'un enfant, a fortiori lorsque celui-ci accuse un retard.

Il est particulièrement complexe pour les enquêteurs  d'être en mesure de recueillir, sans induire, la parole de l'enfant. Il ne faut pas induire mais il ne faut pas non plus paralyser l'enfant, qui ne serait plus alors en mesure de s'exprimer.

Le système de défense habituel des agresseurs qui consistent dans la dénégation des faits qui lui sont reprochés trouve alors ici tout son sens.

Ce jeune homme se défend de ces faits en expliquant que Sarah ne sait pas ce qu'elle raconte, et qu'on ne peut évidemment se fier à sa parole.

Sarah accuse un retard, mais elle n'est pas folle. J'irai même jusqu'à dire que son handicap est un élément de véracité de la parole qu'elle délivre. En effet, la finesse de raisonnement consistant à organiser un mensonge lui échappe totalement. Elle n'est pas non plus, puisqu'elle a subi une expertise psychologique, sujette à la mythomanie ou l'affabulation.

Elle n'est pas armée pour ce genre de comportement et ne comprend d'ailleurs pas qu'on puisse mentir. Lorsqu’on lui a expliqué quel était le système de défense adopté par le fils de son parrain,  elle est entrée dans une colère noire plus d'ailleurs dictée par l'incompréhension de cette attitude qu'elle ne peut même pas envisager.

Je suis, vous vous en doutez, inquiet pour Sarah car je ne sais ce que le tribunal fera de la parole de cette toute jeune fille.

J'espère que le tribunal aura le courage de conférer à la parole de Sarah sa véritable valeur. Je vous tiendrai bien évidemment au courant.


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